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Chroniques
Giuseppe Verdi
Macbetto | Macbeth
Maria Callas fut sans conteste la plus grande Lady Macbeth du siècle dernier. Témoin le triomphe que lui fit le public milanais, ce soir du 7 décembre 1952, mémorable soirée d'ouverture de la Scala. Témoin aussi, l'enregistrement pris sur le vif qui nous est aujourd'hui restitué par Membran. Déjà célèbre en microsillon et doté d'une riche iconographie des représentations scaligères, il a été maintes fois repris en CD, y compris par EMI lui-même en 1993. En effet, il n'existe aucun enregistrement studio de Macbeth avec Maria Callas et l'éditeur anglais au petit chien voulant se rattraper en a racheté en partie les droits. On aurait rêvé d'un film...
On devra se contenter des somptueuses photos prises ce soir-là et des airs de Lady Macbeth que la Divine interpréta en concert, immortalisés par la télévision et disponibles aujourd'hui en DVD. Il suffira d'entende ou de voir notre Diva interpréter le premier air Vienni t'affretta pour rester fasciné par l'assimilation complexe et tragique du personnage maudit de Shakespeare. On assiste progressivement à l'évolution du personnage cruel jusqu'à sa folie meurtrière. Verdi nous a d'ailleurs laissé des indications précises sur sa conception du personnage : « Je voudrais une Lady Macbeth difforme et laide. Je voudrais que Lady Macbeth ne chante absolument pas […] et je voudrais qu'elle ait une voix rauque, étouffée, caverneuse ».
Maria Callas s'est manifestement inspirée de ses intentions. Elle multiplie ainsi les colorations venimeuses et antipathiques sans pour autant étouffer ses moyens exceptionnels. Elle est magistralement aidée par le chef et compositeur italien Victor de Sabata, exceptionnel dans Wagner et Verdi, à l'égal d'un Toscanini. Quelques mois plus tard, en août 1953, ils enregistreront ensemble, pour EMI, une Tosca de légende qui fait encore référence aujourd'hui…
Le reste de la distribution de ce Macbeth est plutôt convaincant avec, en tête, Enzo Mascherini, excellent acteur, capable d'assumer le personnage lâche, mais noble de style, du rôle-titre. Déjà partenaire de la Callas, un an auparavant dans les Vêpres siciliennes, il déploie une belle puissance et une clarté d'aigus, malgré une grande voix un peu ingrate. Écoutez Pieta, rispetto, amore et vous bénéficierez d'une belle leçon de chant. Malgré un vibrato instable, Italo Tajo, aux basses impressionnantes, campe un Banco remarquable. Dans les années soixante, ce grand chanteur se consacrera à la comédie musicale aux USA et tournera un certain nombre de films d'opéras. Seul le Macduff de Gino Penno déçoit. Sans souffle, ses accents véristes sont hors de propos dans le grand air tant attendu Ah, la paterna mano. Globalement, cet enregistrement demeure, néanmoins, un témoignage indispensable de la Callas des grandes années.
MS